↪ La plupart des acteurs économiques et financiers n’aiment pas la théorie tant elle semble opposée au pragmatisme des affaires. Et c’est bien dommage parce que la construction d’une théorie permet de développer l’indépendance d’esprit et la clairvoyance indispensable à la planification financière. Selon l’économiste Clayton Christensen : “les données s’appliquent uniquement au passé, il est donc contre-productif de miser dessus pour prévoir le futur”. D’après lui, il faut se forger une théorie. Cet article retranscrit, de manière simplifiée, ses recherches.
⚡Résumé des points importants
Pour comprendre l’essence même des phénomènes, il faut pouvoir les observer attentivement, les décrire et les mesurer.
La catégorisation des phénomènes permet de simplifier les choses et mettre en évidence des relations importantes.
Le but d’une théorie est de trouver ce qui cause les résultats observés en passant de la corrélation à la déclaration de causalité.
En supposant que la causalité soit établie, il devient essentiel de tester l'hypothèse causale dans différentes circonstances.
🔳La phase descriptive
Observation
Dans la première étape de la construction d’une théorie, vous devez observer attentivement les phénomènes, les décrire et les mesurer. Par exemple, une augmentation des prix conduit à une augmentation du chiffre d’affaires. De cette observation, on peut tirer des concepts : le “signal de qualité” ou encore la “sensibilité / élasticité prix”. Ces concepts ne sont pas des théories à part entière mais simplement des abstractions qui permettent de comprendre l'essence des phénomènes observés.
Classification
Une fois l’observation effectuée, vous pouvez classifier les phénomènes dans des catégories. La classification est généralement définie en fonction des caractéristiques des phénomènes. Dans notre exemple, nous pourrions avoir deux catégories faisant référence à des produits ou segments de marché : “bas de gamme” et “haut de gamme”. La catégorisation aide à simplifier les choses et mettre en évidence les relations potentiellement importantes entre des phénomènes et des résultats.
Association
Dans la troisième étape de la phase descriptive, il s’agit d’explorer l'association entre les caractéristiques définissant les catégories et les résultats observés. La croissance du chiffre d’affaires peut être associée à la catégorie “haut de gamme” et pas à la catégorie “bas de gamme”. Des techniques telles que l'analyse de régression peuvent être utiles pour définir ces corrélations. Au final, on veut obtenir des probabilités d’association au sein d’une population.
🔳La phase prescriptive
Recherche de causalité
Cette quatrième étape est prescriptive et fait suite au travail d’association qui a permis d’établir une corrélation - mais pas une déclaration de causalité. En poursuivant avec notre exemple, on doit pouvoir maintenant déclarer que l’augmentation du chiffre d’affaires est bien causée par l’augmentation des prix. Il ne sâgit plus d’une analyse mais d’une réalité vérifiée : X entraîne Y.
Les circonstances
En supposant que la déclaration de causalité soit correcte, vous pouvez avancer en testant l'hypothèse causale dans différents contextes : par exemple un contexte “normal” et un contexte de “soldes”. Ce n'est que lorsque l’on rencontre une anomalie (on ne retrouve pas le résultat attendu) que l’on doit retourner en arrière à l'étape de la catégorisation. Les circonstances et situations peuvent expliquer ces anomalies. Par exemple, l’augmentation des prix n’a pas abouti à une augmentation du chiffre d’affaires parce que c’était une période de “soldes”. La perte de causalité est une anomalie dans notre théorie qui doit être corrigée en tenant compte des circonstances : “haut de gamme - période normale” et “haut de gamme - période soldes”.
“Si - alors”
Dans la dernière étape prescriptive, le chercheur en quête d'anomalies finit par définir un ensemble relativement complet de circonstances dans lesquelles les acteurs économiques pourraient se trouver. Cela leur permet de faire des déclarations de causalité conditionnelle - des énoncés du type "si-alors" : si on se retrouve dans cette situation, alors on va avoir ce résultat. Cette logique conditionnelle montre comment et pourquoi le mécanisme causal entraîne un résultat différent dans chaque situation. Une théorie prescriptive construite sur des catégories de circonstances bien étudiées peut aider à prédire avec précision les actions qui mèneront ou non au résultat souhaité.
✨ Le rôle de l’architecte finance - “a.f”
L’a.f doit savoir réfléchir par lui même, de manière indépendante et clairvoyante. Cette qualité est particulièrement importante pour planifier et donc évaluer une entreprise. La construction d’une théorie, même de manière ultra-simplifiée et rapide, est le seul moyen d’y parvenir.
Pat Ben | CFO.boutique